[26]. Une jeunesse sénégalaise amère mais saine
Que ne dira-t-on pas à cette jeunesse sénégalaise, régulièrement souffre-douleur des ainés? En réfléchissant sur ce billet, il me revient à l’esprit que ce que je m’apprête à dénoncer ne date pas d’aujourd’hui. Certains se souviennent de l’expression « jeunesse malsaine » que nous avait lancé à la figure l’ancien Président de la République Abdou Diouf, après qu’on lui ai résisté à Thiès.
La semaine dernière encore, un célèbre historien de ce pays a déclaré devant les médias que la jeunesse sénégalaise ne fait que chanter et danser. A juste titre. Sans vouloir nier l’évidence, il nous faut aller au delà de ce constat simpliste et nous poser les questions essentielles.
Comment se fait-il qu’on en soit arrivé à ce stade?
Innocence et Responsabilité
Je crois que la réponse déplacera la sphère des responsabilités. Il est connu de tous que la jeunesse reste cette période où toutes les folies sont « permises » parce qu’on se situe à la frontière de l’innocence et de la responsabilité.
C’est pourtant à cette période que tout se discerne, que tout se dessine, que tout se décide. Cette jeunesse en est à ce niveau, chers messieurs, cette jeunesse cherche des repères et ce ne serait pas du refus d’analyser l’offre disponible avec vous. Qui nous présente t-on comme modèle? Des députés qui s’insultent à longueur de journées ? Des oncles qui détournent les ressources publiques, violent les nièces ou laissent errer les enfants ?
Il faut que vous consentiez à admettre que nos chansons et nos danses restent le résultat de vos politiques publiques et de vos comportements quotidiens. Oui, je vous accuse. Et parce que vous persistez dans cette logique, vous n’avez certainement pas intérêt à ce qu’on arrête de noyer nos craintes, nos envies, notre désespoir et notre colère dans la chanson et la danse.
Lolou sakh mo gueun si yéne sinon celafait un bon bout de temps que « cette crasse de la société » serait venue « cracher dans vos assiettes ». Vous vous rappelez de cette chanson du groupe Pee froiss. Eh ben, c’est toujours valable.
La stratégie d’échec mise en oeuvre depuis plusieurs décennies dans nos universités, n’est certainement pas à notre initiative. Avec un effectif qui frise la provocation, réussir dans ces « temples du savoir » relève d’un miracle.
Mieux, on a voulu discréditer les étudiants auprès de l’opinion en les présentant comme les enfants gâtés de la République, payés chaque mois à apprendre. Ils ont cependant omis d’énoncer les longues heures perdues dans les queue de restaurants, l’entassement dans les chambres et le blocage de la route pour percevoir bourses ou aides.
Ce qu’ils semblent ignorer, c’est la politique de gaspillage et d’appropriation de ressources communes, en lieu et place d’un investissement rentable pour le bénéfice du plus grand nombre. La conséquence visible a été le départ en masse de certains d’entre nous vers l’eldorado, ce fameux « Barsa ou Barsakh » qui a servi de menu à la population marine.
Se méfier de l’eau qui dort
C’était le seul objectif de cette journée puisqu’on a laissé après les « charognards » se disputer la paternité.
Ce qu’ils semblent ignorer, c’est qu’une nouvelle citoyenneté est en train d’émerger dans ce pays. Que cela plaise ou dérange. Sans entrer dans cette querelle de « qui a tort ou qui a raison » à propos de l’occupation du littoral, il faut noter que des citoyens, jeunes pour la plupart, se sont levés pour dire … basta!
Chacun de nous a constaté la réponse qui a été apportée à cette initiative, un assaut honteux.
Ce n’est certainement pas cette jeunesse qui détourne l’argent public. Il faut pour y arriver, occuper des stations de responsabilités mais pour eux on est trop jeunes et inexpérimentés. Ce n’est certainement pas cette jeunesse qui agresse psychologiquement et sexuellement à longueur de journée. On est trop faible, vulnérables.
Alors, y’ en a marre qu’on se défausse sur nous. Nous ne sommes pas le reflet que vous cherchez à fuir. Non, nous valons plus que cela et dans notre effort de survie quotidien, on s’enjaille.