[106]. Loi de finances: tous ces milliards au bénéfice de qui ?
Dans la procédure d’adoption de la loi de finances, l’Administration joue un rôle clé. Même si l’Assemblée nationale valide la loi, elle n’en a pas une grande maitrise. Si nous peinons à nous développer, c’est que des réformes s’imposent.
J’avais publié sur Facebook un post que je reproduis ci-dessous. L’interpellation a été reprise par Khalifa Diakhaté dans Jakaarlo diffusée chaque vendredi sur la Télévision Futurs Médias. Je n’ai pu suivre ce que les chroniqueurs en ont déduit mais ce n’est peut être pas le plus important. Je voudrais poursuivre avec ce billet le débat avec vous.
Cette réflexion faisait suite à des Unes évoquant la répartition du budget pour 2017. J’ai considéré que cet angle de traitement pouvait contribuer à asseoir la « personnalisation » du pouvoir. C’est cette fausse idée qui nous enthousiaste dès qu’une autorité publique nous fait don de billets de banques.
Dans un interview, le Président Macky Sall faisait noter que 30 des 74 milliards votés pour la Présidence seront alloués aux bourses de sécurité familiale offertes aux familles les plus démunies du Sénégal. Il reste cependant que les critères ne sont pas claires ni objectivement définies. 2017 étant une année électorale …
Cette année, le budget prévisionnel du Sénégal avoisinera les 3 300 milliards de F CFA. Selon le Président, « – 1% » est alloué aux trois institutions (Assemblée Nationale, CESE et HCCT). Donc grawoul quoi. Eh Président wakhoul « grawoul » dé, un président ne devrait pas parler comme ça…
Mais de quoi on parle lorsqu’on évoque ces milliards du budget ? Sans aller dans les détails, la loi de finances est un document public, retenons quelques principes fondamentaux pour mieux comprendre les préoccupations que je veux partager.
Validation législative « exclusive »
La version actuelle de la loi de finances trouve sa source dans la Directive n° 05/97, modifiée en 1999 et adoptée par le Conseil des Ministres de l’UEMOA le 16 décembre 1997. Elle vise à harmoniser les législations et les procédures budgétaires nécessaires à l’exercice de la surveillance multilatérale de l’Union.
La loi de finances initiale, dans un souci de plus grande clarté et une amélioration de l’information parlementaire, comprend deux parties. Une première partie réservée à l’autorisation annuelle de percevoir les impôts et les données générales de l’équilibre financier. La seconde partie reprend les grandes masses des dépenses ainsi que les dispositions diverses ayant un caractère permanent ou annuel.
Il peut arriver que les projections enregistrent des variations, en ressources nouvelles ou en dépenses imprévues. Dans ces circonstances, le gouvernement redemande une nouvelle autorisation à l’Assemblée Nationale qui vote une loi de finances … rectificatives qui seule peut modifier les dispositions de la loi de finances initiale.
Une fois le budget exécuté, le gouvernement revienne devant l’Assemblée nationale pour rendre compte et solliciter le vote de la loi de … règlement. Celle-ci constate les résultats financiers de l’année concernée et approuve les différences entre les résultats et les prévisions de la loi de finances initiale. On peut recourir, au besoin, à la loi de finances rectificative.
L’Assemblée a t-elle la capacité de refuser le visa au gouvernement ? Est-ce qu’elle peut faire valoir nos aspirations lorsqu’elles se révèlent contradictoires avec celles de nos gouvernants ?
Eh ben non ! Au delà de la logique majoritaire, le Président de la République peut, par décret, décider de la mise en vigueur de la loi de finances. Cette disposition est invoquée lorsqu’à l’expiration du délai de 60 jours, l’Assemblée nationale n’a pas validé la proposition.
Comme à la loterie mais sans la chance
Partons d’un principe simple mais fondamental. Le budget est la somme des priorités définies par le gouvernement. Et donc à la lecture des différentes rubriques, on peut aisément se faire une idée de l’arbitrage et de l’orientation vers le prestige (confort) ou l’investissement. Institutions ? Santé ? Education ? Armement ?
Le budget enregistre une hausse chaque année depuis que le Sénégal est indépendant. On peine cependant à ressentir ces évolutions au quotidien d’autant plus que nous continuons à apprendre dans des abris provisoires, à vivre de chômage malgré nos diplômes, à mourir faute de ressources pour payer nos médicaments, etc. Nous du peuple la wakh nak.
Cette contradiction ne peut seulement être imputée à la mauvaise gestion. Je soupçonne une incapacité de l’administration à évaluer pleinement nos besoins en vue de leur trouver des solutions. On est plutôt dans une logique mécanique de reconduction alors que d’autres méthodes de faire existent.
Le budget participatif se présente comme un processus par lequel les communautés participent au débat sur la définition des politiques publiques et décident des ressources disponibles à y consacrer. Elles peuvent aussi être associées aux décisions relatives à leur affectation et en assurent le suivi. Il faudra juste accepter de partager le pouvoir. #JeDisCaJeDisRien
Au delà, il faut qu’on se départisse de notre attitude d’indifférence. Pour ce faire, nous devons nous approprier le budget aux fins d’interpeller nos élus et nos administrations sur le respect des engagements. Cela encouragera certainement les députés (Commission finances) à opérer le suivi budgétaire dans certains ministères