15 octobre 2024

[92]. Nos députés sont à l’image de nos smartphones

 [92]. Nos députés sont à l’image de nos smartphones

Nos députés parlent et agissent en notre nom et ce n’est pas seulement une clause de style. Dans la réalité des choses, on peut l’analyser autrement.

Je voudrais évoquer avec vous quelques éléments d’une réflexion personnelle sur notre démocratie qualifiée de mûre. Le Sénégal est indépendant en 1960  et depuis cette date, nous avons codifié des procédures et pratiques. Nous aimons tous ce commun vouloir de vivre en commun même si les compréhensions diffèrent.

Dans notre République, nous avons trois pouvoirs consacrés. Le pouvoir exécutif dirigé par le Président de la République et son gouvernement. A côté, on retrouve les pouvoirs législatif (Assemblée nationale) et judiciaire avec les Cours et Tribunaux. Chaque entité a ses compétences propres et ses attributions détaillées dans la Constitution.

Aux députés, nous avons donné le pouvoir d’autoriser l’exécution du budget, le vote des lois et le contrôle du gouvernement. A l’exécutif, nous avons demandé de veiller sur notre sécurité en travaillant à notre plein épanouissement. Des juges, nous attendons le règlement de nos différends sur la base de règles établies.

Bien que la définition de la politique nationale soit du ressort de l’exécutif, ce sont les députés qui autorisent sa mise en oeuvre. Idem pour les juges qui appliquent les lois votées par les représentants du peuple. On peut donc consentir que l’Assemblée nationale a un rôle de pilier fondamental dans ce dispositif.

Cette position de pivot se justifie par le fait que les députés sont les représentants du peuple et tout acte posé est censé en être l’émanation. Le mandat impératif est donc formellement prohibé, quoique le député soit élu sur la base d’une liste établie par un parti politique. L’élection au suffrage transfert ce pouvoir aux électeurs et non aux partisans.

Une représentation bien nationale

Je comprends parfaitement que la représentation nationale soit à l’image de notre société.Celle que nous avons est donc la copie conforme de l’espace dans lequel nous évoluons au quotidien. Dans notre société, on retrouve des députés issus de l’école du toubab et coranique ainsi que ceux qui n’ont pas du tout « fait les bancs ».

Ce système de représentation peut être un frein comme une opportunité, ou les deux à la fois. Ici, on retrouve des députés qui comprennent l’intérêt général à côté d’autres préoccupés par leurs intérêts personnels. Là encore, on retrouve des députés tournés vers l’action à côté d’autres qui s’accommodent de la réalité des choses sans entreprendre de changements.

La charge de député nécessite pourtant un niveau minimal de compréhension de la marche de  notre société, notre Etat et du monde dans lequel nous évoluons. Il me semble alors que notre représentation nationale peine en certains domaines à suivre le rythme.

Ceux qui animent le pouvoir judiciaire sont des magistrats recrutés suivant un concours réservé à une élite. Ils reçoivent une formation initiale et permanente afin de prendre en charge les phénomènes auxquels ils doivent faire face. Idem pour l’administration aussi bien locale, régionale et nationale. Les députés ne sont ni sélectionnés ni formés.

La pertinence de leurs contributions ne saurait donc s’évaluer à l’aune de leurs performances dans la maîtrise d’un budget. Elle ne l’est pas non plus dans l’interprétation d’une norme constitutionnelle. Ils peuvent cependant être performants lorsqu’ils répercutent les avis et positions de leurs mandants et cette tâche est très largement à leur portée.

Initier ou rejoindre l’interaction

A l’image de nos smartphones, les députés ont besoin de ressources (crédits) pour fonctionner. Ils ont besoin de réseaux pour se connecter et appartiennent à des marques ou des familles politiques.

Nous devons entrer dans une relation de complémentarité également. Il y’ a peu de mécanismes à la disposition des citoyens visant à interpeller le gouvernement mais les députés ont ce rôle. Le vote de lois qui qui régissent nos quotidiens est aussi de leurs prérogatives. Par conséquent, nous devons donc être en mesure de leur dire ce que nous voulons.

Je n’aime pas cette image qu’on veut coller au député sénégalais. Ce n’est pas seulement un élu qui vit dans une relative aisance « tout frais payé » sans que la mission ne soit bien exécutée. Je suis d’avis que nous pouvons influer sur leurs performances. Nous pouvons les interpeller sur leurs positions ou leurs silences, à chaque fois que l’occasion nous sera donnée.

Nous n’avons pas besoin d’attendre que l’ensemble des députés adoptent la manière de faire que nous souhaitons. Il nous faut juste consentir à entreprendre l’effort avec ceux qui sont disposés à jouer le jeu et faire bouger les lignes. Dans un système de représentation, les citoyens restent les mandants.

Nous pouvons contribuer à crédibiliser l’institution parlementaire, c’est qu’on aura validé le transfert de pouvoir vers l’exécutif. Si nous ne parvenons pas à partager nos préoccupations et idées avec nos députés, ce sont les partisans qui feront prévaloir leurs attentes. Si nous ne les encourageons pas à aller au labeur, ils ne franchiront pas les divers obstacles et ne seront pas performants.

Alaaji Abdulaay

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