6 décembre 2024

[145]. La citoyenneté numérique est-elle une réalité au Sénégal?

 [145]. La citoyenneté numérique est-elle une réalité au Sénégal?

Une citoyenneté numérique au Sénégal aurait-elle déjà vue le jour? Nous savons dorénavant que des changements s’opèrent par le biais des TIC. La parole et les initiatives se « démocratisent » et de nouveaux acteurs ont fait leur apparition sur la scène. De prime abord, cette évolution se fait au profit des populations grâce à une meilleure gouvernance du pays. Il reste que des efforts doivent encore être entrepris pour tirer partie de cet outil

Deux évènements se sont positionnés ces derniers temps dans le fil d’actualité des réseaux sociaux. La première salve a été déclenchée par la déclaration de Songué Diouf lors de l’émission Jakaarlo. Sa sortie qui lui vaut aujourd’hui un procès pénal pour apologie du viol a défrayé la chronique. Plus tard, les enlèvements et rapts d’enfants se sont imposés à nous avec des prolongations à Dakar samedi dernier.

D’ordinaire, ces « tâches » étaient à l’initiative de structures formelles notamment des associations ou des organisations. Cette fois-ci, ce sont des citoyens qui ont été à l’origine de la réaction et la mobilisation a connu un tel succès que les autorités ont senti le besoin de réagir. Nous assistons donc à une évolution dans la prise en charge des questions citoyennes et sociales par les citoyens et cela de façon directe.

Ces mouvements ont pris naissance pour la plupart sur les réseaux sociaux, ce qui présage de la naissance d’une citoyenneté numérique. Le qualificatif « numérique » a son importance dans mon raisonnement pour deux raisons évidentes. Son usage permet non seulement de circonscrire le champ de mon raisonnement mais il met l’accent sur l’usage de l’outil.

Parce que nak il faut le relever, des citoyennetés ont toujours existé au Sénégal.

A l’origine, une citoyenneté « numéraire »…

Pendant longtemps, l’argent faisait la différence dans le champ politique. Les débats n’ont jamais véritablement porté sur des programmes ou sur les préoccupations des populations. C’était du donnant donnant et tous les acteurs y trouvaient leurs comptes, disons que c’est ce qu’on s’imaginait. On semblait se retrouver dans un deal où chacun pensait avoir tiré son épingle du jeu, du moins sur le court terme.

Le procédé était très simple parce qu’il fallait juste puiser dans les caisses de l’Etat pour arroser les papa et maman afin de recueillir leurs voix. Peu s’interrogeaient sur l’origine de cette manne financière et le mécanisme a fonctionné sur plusieurs années. Avec la montée de la jeune génération et l’incapacité du système à s’adapter à cette nouvelle donne, le système a rapidement atteint ses limites.

La culture urbaine prenait le relais en mettant à nu les incompatibilités de ce système avec les intérêts des populations. Des messages à relents révolutionnaires comme « Ca va pêter » du groupe Pee Froiss ou « Ceci n’est pas normal » de Positive Black Soul ont eu plus d’écho. Et ils étaient devenus un électorat majoritaire plus ou moins réceptif au discours sur la gouvernance des ressources publiques.

Ce que je retiens de cette période et je l’ai dit en réaction à Simon, c’est qu’une masse silencieuse a pu faire la différence. Nous n’avons pas tous été rappeurs ni directement impliqués dans ce mouvement et pourtant nos actions ont été relativement simples. Certains se sont contentés d’aller à des concerts, d’autres d’acheter des cassettes ou juste d’écouter des lyrics. Et même ceux qui ont essayé de freiner ce mouvement ont braqué les projecteurs sur ce phénomène.

Aujourd’hui, nous notons les prémices de ce changement. Prenez et votez selon votre conscience est devenu un refrain. Et donc lorsqu’un mouvement s’amorce, chacun y contribue à la mesure de son engagement. L’essentiel reste que chacun fasse le job, agit dans ce qu’il pense utile, pertinent et à sa portée. C’est ainsi que les lignes avaient bougé et ce même système va se reproduire avec la citoyenneté numérique.

Vers une citoyenneté numérique

Dans les deux exemples précités, une des parties semblait avoir le monopole, disons un plus grand contrôle. L’Etat avait la maitrise sur les ressources financières et l’utilisait suivant ses desseins. Plus tard, il a perdu la main face à l’offensive du mouvement Hip Hop. Avec Internet cependant, il y’ a comme un équilibre des forces parce que tous se retrouvent sur un espace commun. Neutralité du net dit-on!

L’internet mobile poursuit sa progression et sous peu nous serons majoritairement connectés. Les pouvoirs publics semblent en avoir pris conscience et ont largement investi les réseaux pour communiquer. C’est vrai que nous avons un usage particulier de Facebook, ce qui tend à évoluer quand même. Les exemples cités plus haut montrent par exemple que l’outil peut servir d’autres causes.

Très fréquemment, j’entends certains demander que la mobilisation en ligne se poursuive sur le terrain. A vrai dire, l’engagement sur tous les fronts n’est ni possible ni utile pour toutes les causes. Ce qu’il nous faut comprendre et l’apprécier à sa juste mesure, ce sont ces « actions minimes » de si peu d’intérêts. Cependant, chaque post, un commentaire partagé ou un commentaire a sa valeur.

Dans notre activisme, plus nos initiatives seront partagées, plus elles toucheront un public plus large, ce qui amplifieront l’intérêt. Et donc, il faudra inclure ces « bandits claviers » dans notre stratégie comme cela a été le cas avec les « Bandits Mic » ou les « Bandits Cerveaux » dans le passé. C’est seulement ainsi que nous pourrons tirer parti de toutes les opportunités que nous offrent les différents acteurs.

Par ailleurs, nous devons profiter de l’ouverture de ce système en devenant acteur du changement. Sur Facebook par exemple, rien ne m’empêche de parler de causes qui me parlent et à chercher des appuis. Rien ne doit m’obliger également à parler d’autres causes tout aussi « sérieuses » ou à justifier mon silence. Chacun de nous a la latitude d’user de sa voix et de la plateforme. Donc diaroul nane meu dégoumala si lii alors que waxone nga si léé. Soula lolou nioré, wakh si té bagn masé khar.

Alaaji Abdulaay

2 COMMENTAIRES

  • @El Hadj Abdoulaye, je viens de lire ton article ! Tu es au top ! Well done
    Avec les RS nous avons une chance de prendre une part active dans le débat et l’orientation des politiques nationales.
    Une seule conviction c’est que le changement viendra de la base et les RS ont un impact à ne pas négliger ! Avec de la probité, un éveil des consciences et un changement des mentalités, dans un proche avenir nous deviendrons une sorte de contre pouvoir pour faire du lobbying au service de la justice sociale, et aussi une meilleure allocation de ressources et davantage d’équité dans la redistribution des deniers de l’Etat.
    Ne les laissons pas dans leur zone de confort, d’incompétence et d’absence de conscience citoyenne.

    • Merci pour ces mots, Cécile.
      Très d’accord avec toi que le changement viendra de la base. C’est pourquoi d’ailleurs nous devrons faire l’effort de les informer, les conscientiser sur le rôle que chacun doit jour, individuellement ou dans le cadre d’un collectif. Aujourd’hui, nous avons les outils et les opportunités vont s’offrir à nous de plus en plus. Sans attendre que tout le monde soit prêt, ceux qui pensent jouer le rôle de lead sont invités à le faire, dès maintenant.

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