15 octobre 2024

[163]. Domestiques et gens de maison: une règlementation fortement ignorée

 [163]. Domestiques et gens de maison: une règlementation fortement ignorée

wambedmi, oser la citoyenneté

La relation que les sénégalais-es entretiennent avec les domestiques et gens de maison relève généralement de l’informel. Ce comportement n’est pas toujours dû à une absence de cadre règlementaire. Il renvoie plutôt à un choix, tantôt profitable tantôt préjudiciable à l’employeur ou au travailleur domestique.

Lorsqu’on évoque la question des domestiques et gens de maison, différents textes peuvent intervenir. Je ne pourrais pas prendre en compte toute la règlementation pertinente mais je peux quand même préciser les références. J’évoque notamment la Constitution, le code du travail et trois arrêtés édictés par différents ministres du travail depuis 1968.

Le texte de référence est l’arrêté n° 0974 du 23 janvier 1968. Pris par Abdou Rahmane Diop, ministre du travail de l’époque, le texte détermine les conditions générales d’emploi des domestiques et gens de maison. Il a été modifié par deux fois en 1972 et en 1975 pour préciser ou actualiser certains points.

L’arrêté n° 3006 MFPTE-DTSS du 20 mars 1972 est donc venu préciser les conditions dans lesquelles les employés de maison sont admis à la prime d’ancienneté et à l’indemnité de licenciement. Les catégories ont été revues ainsi que les spécificités de la fonction de gardien permanent de maison.

Le 12 septembre 1975, Aliou Badara Mbengue intérimaire du ministre du travail, prit l’arrêté n° 10117 MFPTE-DTSS-CAB4. Ce texte a réactualisé les salaires minima hiérarchisés des domestiques et gens de maisons. Il fallait prendre en charge les aspects liés aux nouvelles catégories professionnelles et aux conventions collectives.

D’autres textes sont intervenus plus tard, avec une incidence directe ou indirecte sur ces travailleurs. Ils ont été édictés aussi bien au niveau national qu’à l’échelle internationale avec l’OIT notamment.

Bien que ces textes datent de plus d’un quart de siècle, il semble que peu d’entre nous en soyons informés. Vous vous rappelez des résultats du sondage que j’avais faite? Personne de ceux et celles qui y ont participé n’ont eu à signer un contrat. Cet accord devrait pourtant être la source principale des règles que nous tentons de présenter ci-dessous.

Qui est réputé domestique ou gens de maison ?

Il s’agit de tout salarié embauché au service d’un foyer et occupé d’une façon continue aux travaux de maison. Le personnel à temps partiel embauché pour moins de 20 heures de présence par semaine n’est pas ici concerné. Cette dernière relation se règlera d’accord parties. Et donc, les sept catégories répertoriés sont classées ci-dessous :

  • Première catégorie : boy ou bonne débutant ou ne pouvant pas justifier de plus de deux ans de pratique;
  • 2e catégorie : boy ou bonne n’assurant qu’une partie des travaux de la maison, notamment le lavage du linge. Figurent également dans cette catégorie la bonne d’enfants et le gardien, logé ou non, de maison d’habitation au service d’un particulier.
  • 3e catégorie : boy ou bonne chargé d’exécuter l’ensemble des travaux courants d’intérieur et justifiant de plus de 2 ans de pratique
  • 4e catégorie : boy cuisinier ou bonne cuisinière assurant l’ensemble l’ensemble des travaux d’intérieur y compris la cuisine courante
  • 5e catégorie : cuisinier ou cuisinière qualifié de maison
  • 6e catégorie : cuisinier ou cuisinière qualifié de popote de plus de 8 personnes
  • 7e catégorie : maitre d’hôtel

L’intérêt de cette classification réside dans la fixation des salaires minima. Pour exemple, un boy ou une bonne débutant de la catégorie 1 doit prétendre au moins au salaire minimum inter professionnel garanti (SMIG). Suivant la catégorie, on applique une majoration sur le SMIG de 5, 18, 23, 30, 63 jusqu’à 100% (7e catégorie).

D’autres avantages peuvent être accordés aux employés de la catégorie 1 à 5. Ils bénéficient d’une indemnité égale à 5% du salaire de base lorsque plus de 5 personnes vivent habituellement sous le toit familial de l’employeur. Mo way 🙂

Les modalités de la collaboration

Les relations employeur – employé, par rapport à ce qu’elles impliquent, doivent être formalisées. L’absence d’engagement écrit, en plus de rendre difficile le suivi des engagements, favorise diverses interprétations. Sous ce rapport, il est de bon ton de détailler les prescriptions légales énoncées dans les textes citées plus haut.

Noter d’abord que vous pouvez demander, à vos frais, que votre futur employé fasse un examen médical. Une période d’essai peut également être envisagée pour une durée maximale d’un mois pour les débutants. Elle sera de 15 jours pour les autres catégories et dans tous les cas, doit être fixée par écrit au moment de l’engagement.

Passé ces étapes, vous pouvez mettre fin à la collaboration ou vous engager dans une collaboration. Voyons ensemble les principaux éléments

Heures de travail

La durée normale de travail pour les domestiques et gens de maison est de 60 heures par semaine, soit 10 heures par jour. Il peut cependant travailler moins mais ne sera payé normalement que s’il dépasse les 40 heures. Au delà de la durée normale notamment à partir de la 61e heure, on engage les heures supplémentaires.

Le domestique peut aussi prétendre à un jour de repos hebdomadaire de repos, en principe le dimanche. Les parties peuvent cependant convenir d’un autre jour ou de deux demi-journées dans la semaine. En tous les cas, il n’est pas obligatoire de fournir le logement et la nourriture. Ce sont des avantages en nature dont la valeur peut être déduite du salaire dans la limite des taux prévus par la règlementation.

Congé payé

Les domestiques et gens de maison ont droit à un congé payé à la charge de l’employeur. Il est acquis après une durée de service effectif d’une année mais peut se cumuler sur une période maximum de 3 années, d’accord parties. La durée peut être augmentée d’un jour ouvrable par période entière de 5 ans de service chez le même employeur.

Il peut cependant être remplacé par une indemnité compensatrice. Celle-ci intervient pour tout salarié qui n’a pas pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit à la date de rupture de son contrat. Par ailleurs, en cas de rupture ou d’expiration du contrat, une indemnité proportionnelle au temps de service sera accordée à la place du congé.

Absences et permissions exceptionnelles

Les domestiques et gens de maison ne peuvent s’absenter sans autorisation ou justification. Lorsque celle-ci est renouvelée au cours de la même mensualité, elle peut être considérée comme un abandon du travail. Dans ce cas, la rupture du contrat peut intervenir sans indemnité ni préavis.

Des permissions exceptionnelles d’absence peuvent être accordées pour des évènements familiaux aux domestiques et gens de maison ayant six mois au moins d’ancienneté. Elles doivent faire l’objet d’une autorisation écrite préalable de l’employeur sauf cas de force majeure. Dans cette dernière éventualité, le travailleur doit aviser son employeur dès la reprise du travail, preuve à l’appui.

Ces permissions qui n’entrainent pas de retenue sur salaire sont non déductibles du congé payé et ne peuvent excéder 10 jours par an. Elles durent deux jours s’il s’agit de son mariage, du décès de son conjoint ou d’un descendant en ligne directe. En cas de décès ou de naissance (baptême), seule une journée de permission est autorisée.

Préavis et licenciement

Comme toute relation a une fin, un préavis est requis dans le cas d’un engagement à durée illimitée. Chacune des parties a droit d’y mettre fin en prévenant l’autre partie par écrit, 8 jours à l’avance. En cas d’inobservation du préavis, la partie responsable de la rupture devra verser une indemnité égale au montant des appointements en espèce et en nature correspondant à la durée de ce préavis.

Pour permettre au travailleur de chercher du travail, du temps doit lui être accordé pendant cette période. C’est ainsi qu’il bénéficie de deux heures par jour, pendant les heures de travail, à l’exclusion des heures de repas. Ces heures seront prises alternativement, un jour au choix de l’employé, un jour au choix de l’employeur si les parties ne trouvent pas un accord.

Les domestiques et gens de maison licencié après une année de service, aura droit, sauf le cas de faute lourde, à une indemnité de services rendus. Celle-ci est égale, pour chaque année de service à 20, 25 ou 30% du salaire mensuel suivant l’ancienneté.

Maintenant que vous avez ces détails, envisagez-vous de formaliser votre relation avec vos domestiques et gens de maison? Avant que je n’oublie, il sera très utile, en fin de collaboration, de fournir un certificat de travail. Cela permettra aux domestiques et gens de maison de prétendre à l’ancienneté.

Alaaji Abdulaay

1 Commentaire

  • Bonjour,je suis locataire d’une maison avec gardien.
    Le propriétaire m’a donné congé au 31 mai,et ce propriétaire refuse de continuer sa relation de travail avec le gardien qu’il n’a même pas mis au courant.
    Ce gardien m’avait confié qu’il avait demandé à plusieurs reprises l’établissement d’un contrat de travail et que ça lui a été refusé !
    Pouvez-vous me dire quel moyen il a pour se retourner? Car il va se retrouver du jour au lendemain sans travail et sans logement !
    Je vous remercie d’avance pour votre réponse

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