[21]. Que vaut un code de la route sur l’axe Kaolack – Fatick?
L’état de la route Fatick Kaolack ne choque vraiment plus personne, tellement on est habitué à ce chaos. Vous vous rappelez sûrement des préalables de notre départ de la Gare routière de Pompiers. C’est au moment où le véhicule sortit de l’enceinte que j’aperçu le forokh tiaya. Oh zut, trop tard.
Vous savez lors de ces voyages, il y a un passager toujours plus « entreprenant » que les autres. C’est généralement un enseignant, un chômeur à la retraite ou un marchand ambulant. Ils ont en commun de tout lire dans les journaux et de tout suivre à la télé. Ils en connaissent un bon bout sur tout et peuvent vous tenir une discussion sur 500 kilomètres. Donc quand on aime tendre l’oreille, c’est le must.
J’adore personnellement voyager avec eux pour profiter de leurs analyses de la situation politique, économique et social. Sans chichi. Et puis d’ailleurs, ils ont un sens de la réparti à nul autre pareil, contrairement aux cadres moyens qui restent si avares en parole. Comme s’ils redoutaient de révéler un secret d’Etat, ils peuvent garder le silence durant tout un trajet.
Wayé nak, si vous n’avez pas voyagé avec une jeune demoiselle fraîchement sortie de l’adolescence, étudiante de surcroît, vous n’avez rien vécu. Aah, elle nous en a fait voir, un truc de ouf.
Le péage pour le client
Après les salamaleks, le péage fut le premier point inscrit à l’ordre du jour des discussions. Notre gars, le très entreprenant demanda au chauffeur s’il avait prévu d’emprunter cette « voie commerciale » si rapide
– « Oui, si le coût est supporté par les clients. Na kou nek diokhé 200« , lui rétorqua le conducteur.
Je reste aujourd’hui encore persuadé que le gars s’attendait à la réplique du chauffeur, au vu de l’argumentaire qu’il lui a servi. Passons sur les détails. Il fit noter à son interlocuteur que le ticket du péage ne devait nullement être supporté par les passagers qui déjà avaient casqué. Et puis d’ailleurs, emprunter la nationale entraînerait une sur-consommation de carburant liée aux embouteillages.
Il renvoya donc au chauffeur ses vérités, ce qui ressembla au finish comme du temps perdu. Il fut finalement convenu entre passagers, de se cotiser. Sur la base d’un calcul rapide : 200 francs x 7 = 1 400 F CFA, le prix du péage entre la Patte d’oie et Diamniadio. L’extension n’est pas encore prête donc seul ce tronçon était ouvert à la circulation.
La chaleur faisant son effet, le calme revint peu à peu dans la voiture. Chacun essayait certainement d’économiser ses énergies mais je compris vite la raison de cette « sérénité ». C’était plutôt du stress mal contenu. En réalité, les passagers du véhicule se préparaient à l’état de la route Fatick – Kaolack, ces fameux 50 kilomètres. Quelque soit l’ingéniosité du chauffeur, il fallait « choisir son trou ».
Bien entendu, nous avons disserté sur les responsabilités des uns et des autres, sur la commande publique, la préférence nationale et l’expertise locale. La discussion a même débordé sur la passivité des kaolackois et leur incapacité à faire pression sur l’Etat pour la réfection de cette route. Sani khère bi mom doumasi sori
Route, voiture et clients dans tous leurs états
Ah oui, j’ai failli oublier la pause pipi sur le bord de la route, pratique courante. C’est probablement dû au fait que les conducteurs ne font pas d’arrêts sur les longues distances alors que le code de route me semble t-il prescrit un repos après 2-3 heures.
J’ignore si la conduite en continu a un lien avec certains accidents de la route. En tous les cas, la sécurité routière est un challenge pour nous tous, c’est connu. Cettte histoire de pause de sécurité n’est cependant pas évident à mettre en oeuvre. Je vois d’ici des passagers servir du tchipatou au premier qui s’évertuera d’en faire la suggestion. Ce qui importe le plus souvent, c’est d’arriver vite.
Cette pause donc offre l’occasion aux uns de se soulager dans les buissons, à d’autres de se dégourdir les jambes. Les adeptes du pipi au bord de la route sont généralement des hommes. Il est assez rare de voir les dames s’adonner à cette pratique parce que takhaw jakarlo ak aleu bi nane thiour mom, c’est pas élégant. Nous avions dénoncé cette pratique dans un article précédent.
Et voilà, nous y sommes. Kaolack s’était annoncée depuis Fatick. Coup de chaleur, taxis jaune-noire, jakarta et salamaleks d’usage longuement échangés, tout un cérémonial qui promet un séjour prometteur.
El hadj Abdoulaye Seck
Kéneu si wambedmi