9 septembre 2024

[188]. Le Camp Climat est-elle la réponse à l’urgence climatique?

 [188]. Le Camp Climat est-elle la réponse à l’urgence climatique?

Cette semaine est marquée par une mobilisation internationale pour le climat. Elle est menée par plusieurs organisations mais la plus en vue est le mouvement #FridayforFuture de Breta Thunberg. Ces jeunes ont initié le #ClimatStrike (la grève du climat) pour attirer l’attention des leaders mondiaux sur notre propre survie.

Cette prise en main des jeunes est comme un coup de poing reçu en pleine figure. Elle nous rappelle notre incapacité à prendre des décisions majeures ou à les respecter. Au Sénégal, j’ai vu une grande implication de Teranga Lab basé à Rufisque. Au-delà de la grève, ils ont mobilisé les jeunes pour le nettoyage des plages et le reboisement.

Auparavant, nous avions campé.

Le Camp Climat 2019 est à mon sens l’un plus grand rassemblement, parti d’une initiative de volontaires et de citoyens. Les jeunes qui ont séjourné dans ce lieu exotique pour parler toubab, ont fait preuve d’engagement sans faille. Je voudrais ici leur dire tout mon respect.

J’ai perçu cette expérience comme humainement très valorisante. Je n’ai pas l’âme aventurière et j’aime peu sortir de mon zone de confort. Seulement, il y’avait une énergie qui me poussais inlassablement vers ce regroupement. J’ai essayé de le mettre à profit pour un projet citoyen mais ce point ne sera pas abordé ici. Parlons de Bamboung 2019.

Pendant 10 jours, nous avons campé au niveau de l’aire marine communautaire protégée de Bamboung. C’était mon second séjour puisqu’en 2017, j’y étais également et à cette occasion d’ailleurs, j’avais subi un choc environnemental. J’en racontais les détails des agressions environnementales et cette année encore, je m’attendais à vivre d’autres sensations. Je ne fus pas déçu, au contraire.

L’aire marine protégée du Bamboung est une réponse à l’érosion côtière et c’est peu de vous dire que la zone est impactée. Bamboung se trouve dans la commune de Toubacouta et il faut une traversée de la mangrove en pirogue. Il faut ensuite une balade à pied d’un kilomètre environ, à travers champs et plantations. Il n’y a dans cet environnement ni eau courante, ni électricité. Par contre, ils ont une reine et je l’ai trouvé comme je l’avais imaginé.

Pour établir le camp climat 2019, les organisateurs avaient aménagé des tentes mobiles pour loger les trois cent participants. L’événement a eu lieu pendant le mois d’août, une saison pluvieuse qui n’a pas toujours facilité les choses. J’avais pu aménager dans une zone à relief élevé, ce qui m’a mis à l’abri des inondations. Tout le monde n’a pas été aussi chanceux et certains ont, à l’occasion, vu leurs matelas gorgés d’eau.

Nous avons tous constaté que l’eau de pluie ruisselle d’une zone à une autre selon le niveau d’élévation des surfaces. Aussi long que sera son voyage, l’eau finit par retourner à son lit. Méconnaitre ce principe ou en faire fi a causé la plupart des inondations que nous avons constatées ces dernières années. On dit des victimes qu’ils ont construit dans des « zones non aedificandi ».

A défaut d’anticiper, faire face et s’adapter

En 2013 déjà, nous parlions des inondations et cela n’a pas empêché, 6 ans plus tard, que le plan Orsec (organisation des secours) ne soit déclenché. J’avais d’ailleurs suivi le reportage d’une dame qui avait pris ses quartiers à l’école Senghane Badiane de Ndorong. Je connais bien cette école pour avoir fréquenté le collège Serigne Bassirou Mbacké. C’est pourquoi, j’ai beaucoup de peine d’ailleurs à imaginer des familles entières y vivre, dans ses conditions.

Nous avons donc connu les inondations au Camp Climat 2019. Si vous devez camper et que vous en avez l’occasion, achetez une « double-tente ». Il s’agit en réalité de deux tentes superposées pour n’en former qu’une. Elle a l’avantage d’amoindrir la chaleur et de vous mettre à l’abri de l’eau qui s’infiltre. Je n’en avais pas mais j’avais une éponge avec moi. Avant ce séjour, je ne me rappelle pas avoir été aussi content de l’avoir avec moi. Nitt day ganayou way 🙂

Il faut quand même reconnaître que ces moments ont été très éprouvants pour nombre de participants. Loula bett meun leu et on n’était pas vraiment préparés pour cela. Il fallait les voir ndeyssane traîner leurs habits et sacs de couchages à la quête du soleil. Au détour d’une discussion, je surpris un « ouma xamone li mofi am douma nieuw :(» vite refréné. La meilleure manière de comprendre une situation est aussi de la vivre.

Au fil des jours, les choses se sont améliorées grâce à une meilleure collaboration entre campeurs. Je crois qu’ils ont tous pris conscience de la nécessité de se serrer les coudes pour faire face. Les conditions étaient moins durement ressenties. La pluie n’était cependant pas le seul souci à Bamboung.

Mais courant bi kagn lay nieuw ?

L’aire marine communautaire protégée ainsi que l’ile qui l’abrite n’est pas dotée d’un système d’électrification. Pour avoir du courant ou de l’électricité si vous préférez, il faut vous équiper d’un groupe électrogène ou installer un système solaire. Le camp avait provisionné les deux sauf qu’il n’est pas attendu d’un camp climat une grosse consommation d’énergie.

Pendant la période concernée, il y’eut peu de soleil à cause de la pluie et des nuages qui s’amoncelaient. Faire fonctionner le groupe électrogène sur toute la durée du camp n’était raisonnablement pas possible, du fait des coûts notamment. Il a fallu rationner. Le bruit pétaradant que nous offrait le groupe électrogène était vachement apprécié. C’est comme un bon plat que vous présentez à une personne que vous avez pris le soin d’affamer.

On n’apprécie l’utilité d’une chose que lorsqu’on en a été privé. Je n’avais jamais suspecté l’addiction que nous avions de ce petit outil qu’est le mobile. La hantise du téléphone éteint cédait petit à petit la place à l’espoir. On pouvait désormais pousser un ouf de soulagement et se sentir déchargé d’un poids, si on parvenait à brancher son chargeur. La prouesse J

Combien de fois avons-nous si facilement trouvé la prise et effectué si machinalement le geste ? Certain-es ont peiné pour accéder « aux deux trous » et comme partout ailleurs, les alliances et amitiés ont servi :). Rien de méchant, juste une opportunité de tester la valeur de son carnet d’adresses. En tous les cas, notre relation avec ce qu’on appelle modernité reste à questionner.

Saurons-nous déterminer ce qui est essentiel à nos vies ?

Au camp, le choix qui s’offrait à nous était des plus simples : nous adapter à la situation ou résister. Chacun de nous pouvons continuer ou essayer de garder ses habitudes par rapport à la consommation d’eau et d’énergie. Chacun pouvait également tirer profit de l’opportunité offerte de voir ce qui nous parait fondamental et accessoire à nos vies. Chaque campeur pourra donner sa réponse quant au choix qui a été le sien.

« Chacun-e peut, à titre individuel, peut changer positivement les choses ». C’est un peu le message que j’aurais retenu du camp et je reste persuadé que c’est vrai. J’ai pu le vérifier en d’autres circonstances. Par quoi, par où commencer ? Par ce qui est déjà à notre portée.

Il y’a un ensemble de petites victoires qu’on peut accumuler au quotidien, en se posant des questions toutes simples :

  • Pourquoi je mettrais en marche la télévision ou même la laisserai-je allumé si je n’ai pas spécialement quelque chose à regarder ? Il se passe toujours quelque chose à la télé mais suis-je intéressé-e par tout ? Alors à quoi bon ?
  • Idem pour mon mobile. Le seul fait de disposer d’une connexion, wifi ou XG, gratuite ou payante, suffit-elle à naviguer sur toutes les plateformes ? Qu’est-ce que je suis en train de chercher ?
  • Dois-je continuer à arroser mon gazon et mes fleurs, laver ma voiture ou ma terrasse avec de l’eau potable ? N’ai-je pas d’autres alternatives ? Ai-je cherché d’ailleurs ?

Au quotidien, vous posez sur beaucoup d’actes vous poser ces questions simples et agir en conséquence. Ce n’est pas que les font ou s’abstiennent. C’est d’abord de votre responsabilité de faire ou de vous abstenir, pour sauver ce que nous avons en commun.

Alaaji Abdulaay

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